L’Éthique hacker
et l’esprit de l’ère de l’information
Ce livre de Pekka Himanen publié en avril 2001 marqua l’Histoire de l’informatique libre et de son apport à la société en générale. L’influence de ce livre a néanmoins été quelque peu amoindrie par la tournure tragique qu’à prise la politique internationale en septembre 2001, et donc il est toujours d’actualité de le faire connaître même 16 ans après sa conception. Il promeut une éthique du travail, une éthique de l’argent et une éthique du réseau tout à fait magnifique. Cela a même inspiré le domaine du management comme on peut le voir sur :
Observatoire du Management Alternatif - Fiche de lecture (HEC Paris)
Voir aussi : https://moodle.utc.fr/file.php/231/Lethique_Hacker_Himanen_par_P.Jollivet.pdf ou document scanné L'ethique hacker de Pekka Himanen
Et aussi : U.C.H Pour la Liberté - L'Ethique Hacker - Divers auteurs Autour du texte de Pekka Himanen ou document scanné L'Ethique Hacker
Ci-dessous un extrait du prologue célèbre écrit par Linus Torvalds :
La Loi Linus
Selon la loi Linus, toutes nos motivations se subdivisent en trois catégories de base. Plus important encore, le progrès qui s’applique à elles se définit comme des « phases ». Il marque le passage de l’une à l’autre. Les catégories sont dans l’ordre : la « survie », la « vie sociale » et le « plaisir ».
La première phase, celle de la « survie », est un truisme. Toute chose vivante a besoin de survivre pour entreprendre.
Mais qu’en est-il des deux autres ? En partant de l’idée que vous êtes d’accord pour dire que la survie constitue une motivation fondamentale, les deux autres découlent de la question suivante : « Pour quoi les gens sont-ils prêts à mourir ? » Je répondrais que toute chose pour laquelle vous perdriez votre vie peut être considérée comme une motivation fondamentale.
Vous pouvez discuter mes choix mais je pense qu’ils collent. Vous pouvez certainement trouver des gens et d’autres créatures vivantes qui placent leurs liens sociaux avant leur propre vie. Dans la littérature, Roméo et Juliette est l’exemple classique bien sûr. Mais vous pouvez aussi considérer l’idée de « mourir pour votre famille/pays/religion » en tant que façon d’expliquer la notion de liens sociaux comme étant potentiellement plus importante que la vie elle-même.
Le plaisir peut sembler un choix étrange, mais j’entends par plaisir plus ce que vous ressentez en jouant avec votre console Nintendo. Ce sont les échecs. C’est la peinture. C’est ce que vous tirez de la gymnastique mentale nécessaire pour tenter d’expliquer l’univers. Einstein n’était pas poussé par la survie lorsqu’il réfléchissait à la physique. Ce n’était pas non plus très social. C’était un plaisir pour lui. Le plaisir est quelque chose d’intrinsèquement intéressant et source de défi.
La quête du plaisir relève certainement d’une grande importance. Vous ne sentirez peut-être pas le besoin impérieux de mourir pour votre Nintendo, mais réfléchissez à l’expression « mourir d’ennui » : certaines personnes préféreraient sans doute mourir que de s’ennuyer à jamais. Voilà pourquoi vous trouvez des gens qui sautent de très bons avions, juste pour le plaisir, pour garder l’ennui à bonne distance.
Et l’argent comme motivation ? L’argent est bien sûr utile mais la plupart des gens seront d’accord pour dire que l’argent n’est pas en soi une motivation suprême. Il est motivant pour ce qu’il apporte, c’est le dernier instrument d’échange pour les choses auxquelles nous tenons particulièrement.
Ce qu’on peut souligner à propos de l’argent, c’est qu’il est assez facile d’acheter la survie, mais il est beaucoup plus difficile d’acquérir des liens sociaux et le plaisir. En particulier, le Plaisir avec un grand P, celui qui donne un sens à votre vie. On ne doit pas cependant écarter la portée sociale liée à la détention d’argent que vous achetiez ou non quelque chose. L’argent demeure un élément puissant, mais il ne demeure qu’un intermédiaire pour d’autres facteurs de motivation plus primordiaux.
La loi Linus ne cherche pas tant à savoir si ces trois éléments motivent les gens mais davantage à établir le progrès comme le passage de la phase de survie à la vie sociale puis au plaisir.
Et le sexe dans tout ça? Il a été et il est encore de toute évidence rattaché à la survie. Mais chez les animaux les plus évolués, il est passé du stade de la survie pure à celui de création sociale. Et pour les êtres humains, le summum du sexe, c’est le plaisir.
En ce qui concerne la nourriture et la boisson ? Cela se vérifie également. (.../... je passe l’analogie sur la guerre...).
Les hackers
Tout ce qu’on vient d’aborder s’applique aux hackers. Pour eux, la survie n’est pas la priorité. Ils survivent bien avec des Twinkies et du Jolt Cola. Plus sérieusement, quand vous avez un ordinateur sur votre bureau, il est peu probable que votre inquiétude porte sur la façon d’assurer votre prochain repas ou de garder un toit sur votre tête. La survie demeure un facteur motivant mais ce n’est pas une préoccupation quotidienne qui élimine les autres motivations.
Un « hacker » est une personne qui a dans le passé utiliser son ordinateur pour survivre (« j’ai obtenu ma pitance en faisant de la programmation ») avant de passer aux deux phases suivantes. Il (ou, en théorie mais trop rarement en pratique, elle) utilise sa machine pour ses liens sociaux. Le mél et le Net sont deux moyens géniaux pour former une communauté. Mais pour le hacker, l’ordinateur est aussi source de plaisir. Pas les jeux ni les images coquines sur le Net. L’ordinateur lui-même est source de plaisir.
C’est comme ça qu’une chose comme Linux est apparue. Vous ne vous inquiétez pas de faire beaucoup d’argent. La raison pour laquelle les hackers derrière Linux se lancent dans quelque chose, c’est qu’ils trouvent ça très intéressant et qu’ils veulent le partager avec d’autres. Tout d’un coup, vous avez le plaisir parce que vous faites quelque chose d’intéressant et vous avez aussi le pendant social. C’est de là qu’est né ce formidable réseau Linux où de nombreux hackers travaillent ensemble parce qu’ils prennent plaisir à le faire.
Les hackers pensent qu’il n’y a pas d’autres phases de motivation que ça. Et cette croyance a une forte influence dans des domaines très éloignés de celui de Linux, comme va vous le montrer Pekka.
Extrait du livre de Pekka HIMANEN « L’Ethique hacker et l’esprit de l’ère de l’information » (2001) - Appendice - UNE BREVE HISTOIRE DU HACKERISME INFORMATIQUE, zip (à lire dans la visioneuse pdf ou sur un autre navigateur que firefox parceque mauvaise police de caractère).
Peter Sunde, le fondateur de Pirate Bay a donné un discours assez cynique au tech festival à Budapest (2017). Il a plusieurs fois clamé qu’Internet était né dans un environnement quasiment parfait et surtout libre. Depuis, la centralisation a corrompu l’anonymat et la diversité du web.
Selon lui, impossible de faire marche arrière, Internet est “fichu” comme il le confie à The Next Web : “Tout est allé de travers. C’est ça le truc, le problème c’est pas ce qui va advenir du futur, c’est ce qui se passe maintenant. On a centralisé toutes nos données et on les a donné à un type nommé Mark Zuckerberg qui est clairement le plus gros dictateur du monde étant donné qu’il n’a été élu par personne.”
Selon Sunde, le fait qu’une petite minorité de personne possède autant de données sur nous signifie qu’ils ont le pouvoir de nous contrôler, d’autant plus qu’il est impossible de leur reprendre ces informations. Pour le moment, ces informations sont souvent vendues à des entreprises dans une visée publicitaire, mais ce n’est qu’une question de temps avant que ces data ne soient cédées à des fins plus sinistres affirme Sunde. “On est super contents des voitures qui se conduisent toute seule, mais à qui appartiennent ces voitures ? Qui possèdent les informations sur les endroits où vont et ne vont pas les gens qui les utilisent ? Les entreprises sont par défaut des entités amorales. Elles n’ont aucune morale. Ce n’est pas un problème, c’est juste leur façon de fonctionner. Elles cherchent le profit et exclue tout le reste. Pour le moment ce n’est pas un énorme problème mais il va venir un temps où elles vont avoir besoin de grossir et d’avoir plus d’argent. Et pour cela elles n’hésiteront pas à broyer votre vie pour que vous vous consacrez à eux”
Si vous trouvez Sunde pessimiste, ce n’est pas fini : “Nous avons perdu le combat depuis longtemps. La seule chose que l’on peut faire c’est limiter le pouvoir de ces entreprises - avec l’aide du gouvernement - mais malheureusement l’UE et les USA ne semblent trouver aucun intérêt à faire ça.”
Enfin Sunde ajoute que nous avons été naïf de confier tant de choses à un Internet aux mains du capitalisme.
Que l’on soit d’accord avec lui ou pas, Peter Sunde semble avoir des idées arrêtés sur le sujet, pas sûr que Zuckerberg le prenne bien, mais ce n’est pas comme si c’était la première fois que l’on pointait du doigt Facebook, qui, il est vrai, possède énormément de données à notre sujet !
source : http://hitek.fr/actualite/pirate-bay-fondateur-dictateur-mark-zuckerberg_14433
http://www.numerama.com/politique/301513-le-fondateur-de-pirate-bay-enterre-lutopie-dun-internet-decentralise.html
https://www.developpez.com/actu/143252/Mark-Zuckerberg-est-le-plus-grand-dictateur-du-monde-selon-Peter-Sunde-le-cofondateur-de-Pirate-Bay/